laicite

Laïcité en Europe

Les propositions du Centre d’Action Laïque

Pour l'Union européenne

La laïcité, qui se fonde sur le principe d’impartialité de l’État, permet à toutes et tous l’exercice de leurs droits et libertés quelles que soient leur origine ou leurs convictions philosophique ou religieuses. C’est un principe fondateur de la démocratie, un élément essentiel de notre vivre-ensemble que nous voulons placer au cœur du système de valeurs européen.

La laïcité est indissociable d’un combat pour la liberté pour soi-même et pour les autres. Elle permet l’autonomie des choix, posés en pleine liberté de conscience et dégagés de toute influence religieuse.

Elle est aussi un combat pour l’égalité et une lutte contre les discriminations, ce qui implique la mise en œuvre de politiques solidaires pour dépasser le postulat d’une égalité théorique, assurer la cohésion sociale et l’épanouissement de toutes et tous.

La laïcité a pour objectif de construire une société juste, progressiste et fraternelle. Une société qui puisse assurer à chacun la liberté de la pensée et de son expression par l’adoption du libre examen comme méthode de pensée et d’action en dehors de tout dogme. La laïcité, c’est aussi et surtout une posture humaniste, ouverte, basée sur l’émancipation de l’individu. Elle souhaite garantir à tous une vie digne et l’accès aux outils qui permettent l’autonomie des consciences et des choix. 

En séparant clairement le pouvoir civil du pouvoir religieux, la laïcité permet l’égalité de tous devant la loi. Cette égalité garantit la liberté de chacun d’adhérer aux idées, convictions ou croyances de son choix.

Le Centre d’Action Laïque appelle les institutions européennes à:

Respecter le caractère laïque du projet européen

En tant que système politique, l’Union européenne se doit d’être neutre et impartiale au regard des différentes croyances. En effet, ce n’est qu’en séparant strictement religion et politique que les institutions parleront à l’ensemble des citoyens européens, qu’ils soient croyants ou non. 

Le socle de valeurs communes sur lequel se base le projet européen est indubitablement laïque. L’article 2 du Traité sur l’Union européenne et la Charte des droits fondamentaux constituent les référentiels éthiques séculiers du projet européen: respect de la dignité humaine, liberté, démocratie, égalité, État de droit, ainsi que de respect des droits humains, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités. Mais aussi pluralisme, non-discrimination, tolérance, justice, solidarité et égalité entre les femmes et les hommes. 

Depuis une décennie, le lobbying religieux conservateur (en majorité chrétien) auprès des décideurs politiques européens s’est considérablement intensifié, avec le soutien des extrémismes et populismes européens et outre-Atlantique. Ce travail de sape des droits fondamentaux s’est concentré en particulier sur les droits sexuels et reproductifs ainsi que ceux des personnes LGBTQI+. Ces initiatives sont loin d’être anodines et ont par ailleurs abouti dans plusieurs pays européens (par exemple en Croatie, Roumanie, Slovénie, Hongrie, Italie). Ces organisations ont également été actives au niveau européen avec plusieurs initiatives réactionnaires soutenues par le Vatican pour tenter de « protéger l’embryon » et la « famille traditionnelle » en Europe.

Face à cette résurgence des conservatismes religieux au sein du politique, notamment européen, le Centre d’Action Laïque invite les futurs responsables européens à: 

  • S’engager avec fermeté pour défendre la neutralité des institutions européennes, condition nécessaire (mais non suffisante) pour garantir la qualité du processus démocratique européen et le traitement équitable de tous les citoyens, croyants et non-croyants.
  • Dans cet effort, s’opposer aux tentatives de certains d’inclure encore davantage les organisations religieuses dans le processus de décision européen.
  • Demander plus de transparence concernant les groupes d’intérêt et leurs sources de financements de tous les groupes d’intérêt, notamment ceux qui cherchent, pour des raisons religieuses, à mettre à mal une série de droits fondamentaux.

Défendre la liberté de religion et de croyance et les droits des non-croyants

La liberté de religion et de croyance, parfois nommée la liberté de pensée, de conscience, de religion et de croyance, est un droit fondamental protégé aux niveaux international et européen (1). Il protège la liberté de chacun et de chacune d’embrasser les croyances, religieuses ou non, de son choix. Comme déclaré par le Comité des droits de l’homme de l’ONU (2), il protège également la liberté de ne pas croire, celle de changer ou d’abandonner une religion ou croyance et celle de ne pas être contraint à se convertir contre son gré. 

Ces dernières années, la liberté de religion et de conviction s’est progressivement hissée à l’agenda européen. L’Union européenne y a consacré une attention grandissante et s’est dotée d’outils pour la promouvoir à l’extérieur de ses frontières. C’est ainsi qu’en 2013, les institutions adoptaient les Lignes directrices en matière de liberté de religion ou de conviction dans la politique extérieure de l’Union. La Commission européenne a également créé un poste d’Envoyé spécial pour la promotion de la liberté de religion et de conviction à l’extérieur de l’UE en 2016. 

Malheureusement, ces instruments aujourd’hui confortent les religions dans la mesure où ils font surtout écho à une tendance croissante relayée par certains groupes religieux et politiques consistant à réduire la liberté de religion et de conviction à la « liberté religieuse » et de l’utiliser à des fins réactionnaires et discriminantes. De nombreuses violations des droits humains sont commises au nom de la « liberté religieuse » et affectent en particulier les femmes, les non-croyants ainsi que certaines personnes en raison de leur orientation sexuelle et/ou de leur identité de genre. Or, si la liberté de religion est bien absolue, ses manifestations peuvent être limitées, notamment pour protéger les droits et libertés fondamentaux d’autrui, et notamment les droits sexuels et reproductifs des femmes et la non-discrimination à l’encontre des personnes LGBTQI+, des minorités religieuses et des non-croyants. 

Le Centre d’Action Laïque invite dès lors les futurs responsables européens à:

  • Promouvoir et défendre la liberté de religion et de croyance, comme droit fondamental protégé par l’Union européenne.
  • Dans cet effort, rappeler en toute circonstance, que cette liberté de conviction inclut la liberté de ne pas croire, celle d’abandonner sa religion et celle d’en changer, ce qui est encore trop peu souligné dans les diverses communications européennes. 
  • Souligner également que la liberté de religion et de croyance ne peut jamais être utilisée pour restreindre, limiter et menacer les droits et libertés fondamentaux d’autrui, comme le mentionnent les Lignes directrices de l’UE sur la liberté de religion ou de conviction.
  • Demander une mise en œuvre effective de ces Lignes directrices. Cela implique de poursuivre et d’intensifier la formation des délégations diplomatiques européennes et des professionnels de l’UE sur les questions afférentes à ce droit et de veiller à inclure les organisations laïques au sein de cette formation.
  • Demander également une évaluation régulière de ces Lignes directrices et mettre les résultats à la disposition du public. 
  • S’assurer que le mandat de l’Envoyé spécial pour la promotion de la liberté de religion et de conviction inclue explicitement la dimension des non-croyants (athées, agnostiques, apostats…).

Défendre la liberté d’expression

La liberté d’expression est indissociable de la liberté de pensée et de conscience. Pourtant, dans le monde mais aussi en Europe, les tentatives d’interdiction au nom de la morale religieuse sont encore nombreuses. Or, la liberté d’expression protège les individus et non pas les religions ou les convictions en tant que telles. La liberté d’expression couvre le droit d’exprimer une opinion sur une religion ou une conviction. Pourtant, hormis les cas où il y aurait incitation à la haine, à la discrimination ou à la violence, il est donc permis de critiquer une religion. 

Dans cette perspective, l’UE a demandé à ses délégations de rappeler ce principe fondamental dans leurs relations diplomatiques avec les États tiers mais aussi de les encourager à dépénaliser l’offense de blasphème et « d’insulte au sentiment religieux ». 

Si l’Union européenne appelle les États tiers à garantir la liberté d’expression par rapport au fait religieux, elle n’agit pas contre les lois anti-blasphèmes liberticides subsistant encore dans certains  États membres et États européens associés (comme en Irlande, Grèce, Pologne ou en Espagne). Le maintien de telles législations au sein de l’UE n’aide évidemment pas à crédibiliser la voix européenne à l’étranger. 

Le Centre d’Action Laïque invite les décideurs européens à se positionner résolument en faveur de la liberté d’expression et à demander la fin de la criminalisation du blasphème et de « l’insulte au sentiment religieux » dans le monde, y compris au sein de l’Union européenne. 


(1) DUDH article 18, ICCPR article 18, CEDH article 9, Charte des droits fondamentaux article 10.

(2) Déclaration universelle des droits de l’Homme, Commentaire Général numéro 22.


Mouvement Laïque

La brochure

Une sélection de pistes de solutions proposées par le Centre d'Action Laïque qui illustrent comment le mouvement laïque souhaite que soient traduites concrètement les valeurs de liberté, égalité et solidarité.